Entre prieuré et château fort

Dans un petit hameau d’Aslonnes, près d’Iteuil, Jeanne et Henri Bernard ont acheté un vieux bâtiment en ruines, il y a cinquante ans. Restauré au fil des années, le prieuré royal de Laverré a désormais retrouvé son éclat et la vie s’est, depuis longtemps, organisée à l’intérieur.

Romain Mudrak

Le7.info

Trois mois. C’est le temps qu’il a fallu à vingt-cinq hommes en forme pourcurer le fond des douves qui entourent le prieuré de Laverré. Quand Jeanne et Henri Bernard ont investi dans ce « tas de pierres », ils voulaient juste un terrain pour jardiner près de Gençay. Finalement, la restauration de ce monument royal-racheté par Louis XV au Duché de Châteauroux au XVIIIe siècle est devenue l’oeuvre d’une vie. C’était il y a cinquante ans. Le jeune couple plein de vie s’enthousiasme pour cette terre en friche et ce bâtiment en ruine, situés dans le village d’Aslonnes. « On était un peu fous. On n’imaginait pas le travail que cela demanderait », plaisante Jeanne. A l’époque,les moutons du voisin dorment...dans la chapelle. Son mur estperforé d’un large passage destiné aux charrettes de foin. Saint Lubin, né à Laverré et berger à ses heures, aurait apprécié. Mais dans les années 60, les Poitevins aspiraient déjà à un peu plus de confort. L’ouverture est finalement rebouchée. En revanche, les fresques du XIe siècle sont pratiquement effacées.

Jardin remarquable

Peu à peu, le prieuré de Laverré devient habitable. A l’intérieur, les pièces de ce « F5 » sont vastes mais sombres, à cause des petites fenêtres médiévales. La tour de garde, aux murs très épais, n’est pas encore aménagée. Henri, formé aux Beaux-Arts, souhaite la transformer en un endroit intime pour lire, réfléchir et créer.

Chaque chose en son temps. Pour le moment, un autre jardin, beaucoup moins secret celui-là, occupe les journées de l’ancien conseiller général et maire de Gençay. Plus de six cents variétés de plantes se disputent la vedette à l’arrière du prieuré. Sur des sentiers battus, les visiteurs traversent des univers faits de couleurs et de formes très différentes. Les sculptures d’Henri marquent les intersections. Deux ruisseaux fendent l’espace pour alimenter les douves, puis se jeter dans le Clain. « A l’avant, j’ai repris la symbolique romane du ciel, de la Terre et du rayonnement des étoiles. Et pour délimiter le tout, j’ai fait venir des pavés de La Rochelle, utilisés autrefois pour lester les navires », raconte Henri avec passion.

Leurs enfants ont quitté la maison. Combien de jeux ont-il pu inventer sur ce domaine rempli de cachettes ! Aujourd’hui, Jeanne et Henri vivent paisiblement au rythme des visites de touristes attirés par le classement aux Monuments historiques et le label de « jardin remarquable ». Le fermier, arrivé bien avant eux, habite toujours dans l’une des ailes de la cour carrée, qui annonce l’entrée du prieuré. « Au début, il voyait d’un mauvais oeil ces nouveaux voisins qui faisaient du bruit. Maintenant, nous sommes devenus de grands amis », conclut Henri, bien content que les moutons n’entrent plus dans la chapelle.

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