De l'eau dans le gaz à Sèvres

À Sèvres-Anxaumont, le projet d’unité de biométhanisation porté par La Baie des Champs fait couler beaucoup d’encre. La colère gronde chez les riverains, qui n’excluent pas de monter un collectif. De son côté, Yves Debien défend son dossier contre vents et marées.

Arnault Varanne

Le7.info

« Plus d’odeur, plus de camions, plus de pollutions, décote de nos maisons. Attention urgence ! » À la mi-mai, deux jours avant la fin de l’enquête publique sur le projet de biométhanisation engagé par la SCEA La Baie des Champs, les habitants de Sèvres-Anxaumont ont reçu un « drôle » de tract dans leur boîte aux lettres. En substance, ce document non signé invitait les Sadébrien(ne)s à s’exprimer manifestement en défaveur de cette « usine à gaz »(1)

Au final, seuls neuf avis ont été consignés dans le rapport. Mais les riverains de l’élevage de porcs établi à Lavault ne désarment pas. « La porcherie a déjà un impact sur notre environnement, l’unité de méthanisation va aggraver la situation, notamment par rapport au trafic routier et aux nuisances sonores et olfactives. De toutes les façons, cette personne fait ce qu’elle veut depuis vingt ans. Personne n’était au courant de son projet ! », esquissent plusieurs riverains, sous couvert d’anonymat.

La personne en question s’appelle Yves Debien. Et le co-dirigeant de la SCEA La Baie des Champs-avec Eric Sabourin-, par ailleurs élu municipal depuis cinq mandats, ne comprend pas les procès en sorcellerie qui lui sont faits. « Je porte ce dossier depuis quatre ans et demi. Neuf personnes ont manifesté leur désapprobation. Sur une commune de 2 000 habitants, le mouvement reste mineur ! » Le ballet des camions à venir ? Il concède qu’un semi-remorque en provenance de l’abattoir de Saint-Maixent acheminera quotidiennement, sur site, l’équivalent de 20T de déchets graisseux, soit 5000T par an. Les opposants doutent de la véracité du chiffre. Comme ils doutent de la sincérité de l’éleveur de porcs concernant l’épandage du digestat. Dans un rapport rendu public le 30 janvier dernier, la Dreal (Direction régionnale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) lui avait d’ailleurs demandé d’en « préciser les modalités », compte tenu de la « présence de captage d’eau à proximité ». « Ce que j’ai fait dans un contre-mémoire…», ajoute illico l’intéressé.

L’affaire dépasse largement les frontières de la commune. Car l’unité de biométhanisation, amenée à produire 2000 Mkwh, soit l’équivalent de la consommation électrique annuelle de 550 foyers (2), a également besoin des déchets alimentaires des cantines de Poitiers et de grandes surfaces pour fonctionner. En plus des lisiers issus de l’exploitation porcine, des fientes de volailles…

Un projet démesuré ?

Le conseiller général du canton de Saint-Julien l’Ars a mis les pieds dans le plat lors du dernier conseil municipal de Sèvres… dont il est élu d’opposition. « Les habitants auront tous les inconvénients sans aucun avantage. Doit-on devenir la poubelle de l’abattoir de Saint-Maixent ? » Face à toutes ces interrogations, Yves Debien tient bon la barre. Le co-gérant de La Baie des Champs a obtenu le permis de construire des premiers bâtiments et attend avec « sérénité » le rapport de la commissaire enquêtrice fin juin. « Après, nous devrions passer devant le Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst), qui dira si nous avons l’autorisation d’exploiter », ajoute le membre actif de Vienne Agri Métha. L’investissement global s’élève à 2M€, supportés à 80% par La Baie des Champs. De leur côté, les opposants ont sollicité un rendez-vous auprès du maire de Sèvres, Nicole Merle. Ils attendent une réponse.

(1) En plus de l’élevage de porcs et de volailles, «La Baie des Champs» a développé précédemment deux projets « verts » : une unité de compostage et la pose de panneaux photovoltaïques.

(2) Hors chauffage.

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