A Poitiers, la semaine dernière a été marquée par une annonce de taille : l’implantation d’un magasin de prêt-à-porter Mango aux Cordeliers, sur une superficie de 950 m2. Au-delà du buzz engendré, le « 7 » pose la question du pouvoir des enseignes nationales. Font-elles la pluie et le beau temps ?
Au plus fort de la crise, le centre des Cordeliers a compté jusqu’à sept pas-de-porte disponibles. Au point que beaucoup se sont posé la question de la pérennité de la locomotive commerciale du centre-ville. A cela s’ajoutent les éternelles rumeurs autour du vrai-faux départ de la Fnac, autre poids lourd historique.
Avec l’arrivée programmée, en fin d’année, du magasin de prêt-à-porter Mango, sur deux niveaux et 950m2, sa « légitimité » ne souffre plus aucune discussion. L’annonce faite la semaine dernière par Terranae constitue une double « première ». D’abord parce que la marque espagnole a choisi de délaisser la périphérie pour le centre-ville. Ensuite parce qu’il s’agit de la deuxième plus grosse installation, après… H&M, vouée à occuper 2700 m2 dans l’ex-Printemps. Ouverture prévue début 2015. Peut-on pour autant parler de reconquête ? Là-dessus, tous les observateurs restent prudents. Le promoteur Virgil laisse entendre qu’il communiquera « à la fin du mois ». Pour donner le nom de nouvelles enseignes amenées à s’établir au Printemps ? Motus et bouche cousue. « Il y a plusieurs barrières à lever sur Poitiers, reconnaît Pascal Sanvoisin, directeur des Cordeliers. Comme le commerce a du mal en ce moment, les enseignes nationales établissent un classement du Top 30 des villes où s’implanter. Et Poitiers n’en fait pas partie… » D’où des « négociations très longues » avec les directions de chaînes. « Quand on est en position de force, pourquoi ne pas demander la lune ! », ajoute le dirigeant de Terranae.
« Poitiers est un marché saturé »
Demander la lune, cela signifie surtout peser sur le prix des loyers. Et exiger des emplacements de premier choix, avec une large zone de chalandise. « Le rythme des implantations baisse, observe un agent immobilier de la place. Poitiers est un marché saturé, donc les enseignes ont le pouvoir de négocier à leur avantage. Il y a une équation économique assez simple. » Une affirmation que ne dément pas Chantal Zimmer. La déléguée générale de la Fédération française de la franchise constate, dans toutes les villes de France, un déséquilibre croissant entre l’activité des centres-villes et de la périphérie. « Il y a eu des erreurs d’urbanisme depuis vingt ans », constate la spécialiste. À l’en croire, les territoires ont aujourd’hui intérêt à « jouer la carte de la différenciation ». Et Chantal Zimmer de prêcher pour la paroisse des franchisés. « Ce sont des acteurs locaux et indépendants, qui ont tout à gagner à ce que leur commerce fonctionne. Les gens confondent souvent la franchise avec une succursale. Les intérêts ne sont pas les mêmes. »
Dans un cas (franchise) comme dans l’autre (succursale d’enseigne), les élus locaux pèsent en tout cas d’un poids relatif. Pendant la campagne des Municipales, le maire de Poitiers avait clairement indiqué « l’arrêt de toute construction de mètres carrés supplémentaires de galerie commerçante en périphérie ». Une manière de protéger le centre-ville et de lui redonner un pouvoir d’attractivité.
Une prospection active
Chaque année, Grand Poitiers consacre 200 000€ à deux salons de référence susceptibles d’attirer de nouvelles enseignes : le Mapic et le Salon de la franchise. « A chaque fois, nous avons une cinquantaine de rendez-vous personnalisés », indique Alain Claeys. Le maire de Poitiers et président de Grand-Poitiers veut croire que l’arrivée d’H&M -« avec l’un de ses dix plus grands magasins de France »- et de Mango va inciter d’autres marques à se positionner. « J’ai toujours été convaincu qu’il y aurait un retour vers le centre-ville. Aujourd’hui, les conditions sontréunies. » Selon l’élu, l’infrastructure de Coeur d’agglo, les services aux usagers et l’animation culturelle sont de nature à attirer de nouveaux acteurs économiques.