Aujourd'hui
Evan Fournier, 18 ans et demi. Ailier prodigue du PB 86, star naissante du basket européen. Fils de judokas gavés de titres, le minot trace sa route direction la NBA. Première étape, cette semaine à Portland. Un contre un avant son décollage.
RTL, L’Equipe, Le Monde, France 2, Basket News. Ces temps-ci, son portable ne fournit pas. Depuis l’annonce de sa sélection au Nike Hoop Summit, rendez-vous incontournable des meilleurs basketteurs en herbe de la planète, les médias font les yeux doux à Evan Fournier. Du coup, il s’excuse de rappeler «si tard» et vouvoie son interlocuteur comme un fils de bonne famille.
Samedi, à Portland, il jouera une partie de son avenir professionnel, au milieu des futures étoiles de la planète basket. Même pas peur. Stressé, Evan ? Que nenni ! «Non, non, assure le plus jeune joueur français (18 ans et 3 mois) à inscrire plus de vingt points dans un match de Pro A. J’suis cool, pour le moment, j’y vais pour taffer…»
Au moment de pénétrer sur le parquet du Rose Garden, son palpitant devrait s’accélérer. Mais la pépite poitevine, élevée au biberon de la performance, ne craint pas la comparaison avec ses contemporains. Il est comme programmé pour le haut niveau. «Depuis tout petit, j’ai cette perspective en tête. Ce n’est pas de l’arrogance, j’ai juste confiance en moi.»
La compétition le stimule. Et l’émulation avec son illustre paternel, François, multiple champion de France sur les tatamis en -86 et -95 kg, le tire vers le haut. Tiens, une anecdote. Evan s’était juré d’obtenir son permis de conduire du premier coup. Raté ! «Je l’ai eu à la deuxième fois, comme mon père…» Depuis un mois, le vice-champion d’Europe juniors roule en «C3», rap à fond avec «un gros A collé derrière». Le kif, quoi !
« Encore rien fait »
Ici bas, le titi parisien surdoué se saisit de chaque bonheur fugace avec délectation. Au côté de Laura, sa chérie rencontrée à l’Insep il y a deux ans, il coule une vie paisible et rangée à Poitiers. «C’est vraiment sérieux. Laura, c’est mon baromètre. Elle veille sur moi, mon alimentation. On est tranquilles.»
Dans son plan de carrière, le numéro 13 du PB 86 a intégré les mots «rigueur» et «travail». Sur ses poignets, d’autres injonctions gravées dans sa chair lui servent de boussole : «intensité» et «agressivité». «Je n’ai encore rien fait, martèle-t-il. Je ne vais pas créer un personnage qui n’existe pas. Mais je sais ce que je veux.»
Gagner. Voilà ce qui l’obsède. La défaite le hante. Ceux qui l’ont croisé, dans les travées des Arènes, au soir de la défaite face à l’Asvel, se souviennent de son visage livide. Presque ravagé. Sa frustration ? Elle le rend «meilleur». Sur sept des huit derniers matchs de Pro A, il tourne à plus de dix points en moyenne. «Je dois encore beaucoup travailler ma défense et mon tir (7/36 à 3pts cette saison)», reconnaît ce pur attaquant. Littéralement aimanté par le panier, Evan Fournier fait preuve d’un culot incroyable à son âge, prêt à marcher sur les vieux routiers de la Pro A. Personne ne l’impressionne.
Une perle à polir
A force de côtoyer le haut du panier, au côté de ses parents judokas, Evan s’est forgé une conviction. «Avant d’être des stars, les sportifs de très haut niveau sont des êtres humains, comme tout le monde. Gamin, je n’allais jamais demander des autographes. C’est ma personnalité !»
Réservé mais jamais sur la réserve, tout à la fois contemplatif et hyperactif, Evan Fournier raisonne déjà comme un adulte rattrapé par la maturité. Précoce, en somme. France 2 va lui consacrer un reportage dans Stade 2, mi-avril. Et alors ? Il a exigé de la chaine publique qu’elle ne tourne pas d’images « au moment de la sieste ». Boulot- dodo. Cette vie d’ascèse, à peine saupoudrée de quelques séances de ciné et autres sorties avec son pote Romain Ostric, devrait le placer sur orbite, à l’horizon 2012. Jusque-là, son plan de vol tient la route. Et le PB 86 tient une perle, polie et élevée au cordeau, sous la coupe d’un Ruddy Nelhomme intransigeant. Les médias n’ont pas fini de se pencher au-dessus de son berceau.
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