Aujourd'hui
La flambée des prix des matières premières, du cuivre en particulier, encourage plus d’un escroc à chercher fortune sur les chantiers ou dans les entreprises...
Le manège ne date pas d’hier. Mais il tourne toujours plus vite lorsque les prix sont gonflés à la caisse.
Par les temps qui courent, se lancer dans le commerce des métaux constitue un bon plan. Encore faut-il que le produit de la vente ait une origine « au-dessus de tout soupçon ». Las. Il semblerait que sur ces six derniers mois, la flambée du coût des matières premières (+39% hors matériaux précieux et carburant), du cuivre (+ 35%) ou de l’aluminium (+19%) ait dopé les velléités de négoce frauduleux.
« A 5 ou 6€ le kilo à la revente, le cuivre, pour ne citer que lui, est devenu un vrai objet de convoitise. » Secrétaire général de la Fédération du Bâtiment de la Vienne, Philippe Huet est chaque jour confronté aux plaintes d’artisans victimes de vols. « Ça n’arrête pas, pérore-t-il. Les entreprises sont sans cesse visitées, les chantiers pillés. Nous recensons pas mal de cas de fauches commises par des ouvriers dans leur propre société ou d’adeptes du travail au noir, qui viennent se servir chez l’artisan du coin, ici d’un engin, là d’un échafaudage. Mais les vols de carburant et de métaux pour la revente constituent une majorité des exactions perpétrées. »
Mardi dernier, Philippe Huet était au tribunal correctionnel de Poitiers, où comparaissaient deux individus suspectés de sept vols sans effraction et deux avec effraction sur le seul chantier de la Piquetterie, quartier des Trois-Cités, entre juin 2010 et mars 2011. Butin estimé de 46 700€, au préjudice de quatre sociétés.
Dans l’attente, la FFB, qui souhaite se porter partie civile, a décidé de tirer la sonnette d’alarme. « En 2009, nous avions passé une convention avec le préfet pour obtenir notamment, de la police et de la gendarmerie, un engagement à multiplier les rondes sur les chantiers sensibles. Après quelques mois de flottement, inhérents à la baisse d’activité générale de notre secteur, nous avons demandé à ce que ce dispositif soit de nouveau renforcé. C’est indispensable pour la survie de nos entreprises. »
Quatre interpellations en quatre jours
Le message a été reçu cinq sur cinq. Et porte visiblement déjà ses fruits. Le cas des deux interpellations précitées est en effet une redite. La semaine précédente, deux autres individus avaient ainsi été pris, par les agents de la Bac, en flagrant délit de récupération de câbles de grosse section, de matériel et d’outillage dérobés dans l’entreprise mignanxoise Debuschère. Butin : 15 000 €.
«Les binômes fonctionnent bien, ironise le directeur de la sécurité départementale, Johannes Wilhelm. Il n’y a pas forcément de réseaux organisés, mais chaque interpellation est pour nous une victoire. Ces deux cas en moins d’une semaine prouvent que nos rondes et nos investigations sont efficaces.» lles ne devraient que se densifier au fil des prochaines semaines. Les "métallos-resquilleurs" sont prévenus.
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Patte blanche pour la revente
Le saviez-vous ? Un particulier désireux de vendre quelques pièces de métal peut facilement trouver son bonheur. « Il lui suffit de venir nous voir », prévient Dominique Guigo, directeur de la plateforme de recyclage Véolia. Mais l’« affaire » ne se conclut pas sans cadre réglementaire. « Nous tenons un livre de police, que les forces de l’ordre vérifient régulièrement, poursuit M. Guigo. On y relève l’identité de chaque apporteur, le numéro de sa carte grise, la nature de la matière déposée, le tonnage de la cargaison et on demande des précisions sur son origine. Dans tous les cas, on refuse les bobines métalliques neuves et, à l’opposé, celles qui sont brûlées ou très détériorées. »
A partir de 500€ d’achat, Véolia paie par chèque. « Au-delà, pour tout apporteur régulier, on demande, à partir de 3000 € de dépôts cumulés, un justificatif d’inscription au registre du commerce ou de statut d’auto-entrepreneur, plus un justificatif de cotisations Urssaf des six derniers mois. » Difficile, dans ces conditions, de frauder. De là à dire que c’est impossible…
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