Juifs et musulmans fraternisent

Depuis trois ans, une dizaine de Poitevins membres des communautés musulmane et juive se rencontrent régulièrement pour échanger sur ce qui les rassemble. Ce sera le cas encore samedi.

Arnault Varanne

Le7.info

Le hasard des rencontres les a mis autour de la même table, un soir de 2018, au Toit du Monde, à Poitiers. Lakhdar Attabi en était encore le président. Avec l’un de ses amis, il s’est assis en face de Danièle Parda, ancienne professeure d’anglais, également accompagnée d’une amie. Ils ne se connaissaient pas. L’homme de confession musulmane et la femme de confession juive se sont revus, puis ont convenu d’initier un rendez-vous plus régulier. Depuis janvier 2019, ils et elles sont huit à se voir « à peu près tous les deux mois » 
à raison de deux heures par séance. « Le but est de mieux se connaître », avance Danièle Parda, initiatrice d’un groupe d’amitié judéo-chrétienne, qui loue un « haut niveau d’ouverture et de réflexion ».

Plutôt que de s’écharper autour des sujets qui divisent (la Palestine, les attentats, l’assassinat de Mireille Knoll...), les protagonistes préfèrent fraterniser, notamment autour des fêtes religieuses des uns et des autres. « Pendant Hanoucca 2019, Karim El Hadji (professeur de français et d’histoire-géo au collège et à Sciences Po, ndlr) est venu avec son fils. On a été très touchés. C’était la première fois qu’un musulman s’associait à notre fête des lumières. » Après plusieurs rencontres au lycée Isaac-de-l’Etoile, la synagogue a servi et sert encore de quartier général au petit groupe interconfessionnel, sans que cela ne provoque une levée de boucliers de part et d’autre.

« Heureux de 
se retrouver »

Musulmans et juifs cassent les codes sans bruit. « Peut-être parce qu’on n’a pas mis sur la table des sujets trop clivants... » 
Peut-être aussi parce qu’à Poitiers, « on vit bien ensemble », dixit Lakhdar Attabi. Lequel a un jour livré des cornes de gazelle à Danièle Parda, en marge du ramadan. « Les fêtes, c’est ce qui suscite un grand intérêt de part et d’autre. C’est central dans nos religions », avance l’octogénaire. Après la parenthèse Covid, qui a transformé les rencontres en visioconférence, le petit groupe a été « heureux de se retrouver ». Samedi, ils et elles parleront de la situation en Ukraine de manière documentée. Si le groupe informel n’a pas vocation à se transformer en association voire en collectif, il ne verrait pas d’un mauvais œil son élargissement.

Et la laïcité ? De part et d’autre, on la vit bien. « Ce n’est absolument pas un frein », répond Danièle Parda. De son côté, le professeur en lycée défend la laïcité à la française, « ouverte et respectueuse des autres. Sa définition me ravit ». A leur échelle, modestement, musulmans et juifs contribuent à apaiser les débats. « Savoir qui est l’autre et ce qu’il pense permet de déconstruire les préjugés », conclut Danièle Parda. « Nous sommes des porte-parole d’une fraternité, pas des religions. Et on se rend compte que nous avons énormément de similitudes », renchérit Lakhdar Attabi.

Plus d’informations auprès de Danièle Parda à daniele.parda@orange.fr ou de Lakhdar Attabi au 06 45 81 80 87.

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