Une ascension sociale à (ré)inventer

Dans la Vienne, 27,4% de fils d’ouvriers et d’employés parviennent au statut de cadre ou aux professions intermédiaires. Le département figure au soixante-treizième rang français. Explications.

Arnault Varanne

Le7.info

 C’est un pavé dans la mare que dévoile l’enquête de France Stratégie, un organisme de réflexion et d’expertise dont Matignon utilise les rapports tous azimuts. Selon sa dernière enquête, sortie début novembre, l’ascenseur social serait loin de fonctionner correctement en Poitou-Charentes.

En fait, le « think tank » (groupe de réflexion) a étudié la proportion de fils d’employés et d’ouvriers, nés entre 1965 et 1979, devenus cadres ou professions intermédiaires. La moyenne nationale s’élève à 33% et les quatre départements de la région se situent en dessous. La Vienne arrive deux rangs derrière les Deux-Sèvres, avec un taux d’ascension de 27,4%. « Pour les individus d’origine populaire, la mobilité ascendante apparaît faiblement liée au dynamisme économique des territoires. Elle est, en revanche, fortement liée à l’éducation, en particulier à l’obtention d’un diplôme du supérieur », commente Clément Dherbécourt, l’un des auteurs du rapport.

Etonnant s’agissant de la Vienne, quand on sait que Poitiers bénéficie d’un large panel de formations et d’une université pluridisciplinaire. « La massification de l’enseignement secondaire puis supérieur a certes favorise? globalement la mobilité sociale ascendante, mais sans faire disparaître les « trous noirs » de l’éducation et de la promotion sociale », répondent les auteurs de l’étude.

Le rectorat vigilant

Ce qui ressort, c’est le rôle essentiel joué par trois facteurs clés sur la réussite scolaire : la structure familiale, l’éducation et la mobilité géographique. Poitou-Charentes compte notamment davantage de familles monoparentales qu’à l’échelle nationale (13,9% contre 12,8%). Sur le deuxième volet, la lutte contre l’échec scolaire et l’orientation sont deux phénomènes dont l’académie de Poitiers s’empare depuis plusieurs années. « Le lien entre les lycées et l’enseignement constitue un enjeu très important », estime Stéphane Gilot, chargé de mission auprès du recteur sur cette thématique.

Du bac «-3» au «+3», le challenge consiste à amener un maximum d’élèves d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur. Le dispositif « Pass’enSup », qui vise dix-sept établissements de la région, permet aux Première et Terminale de s’immerger dans leur future vie d’étudiant. Et accessoirement de se projeter vers un métier à forte valeur ajoutée. « Mais avant d’emprunter une voie professionnelle, il y a une phase d’immersion cruciale. »

Si, entre 2013 et 2014, le taux d’entrée dans le supérieur a stagné, ce n’est pas le cas en 2015. Selon les chiffres du portail Admission post-bac, en Poitou-Charentes, 3% d’élèves supplémentaires -six cents- ont accepté les propositions qui leur ont été faites, après les voeux émis au printemps. « Nous avons notamment un nombre accru de bacheliers professionnels qui s’inscrivent dans un cursus plus long », éclaire Stéphane Gilot. D’où l’intérêt de lier aussi formation et information. Début 2016, près de deux mille lycéens auront la possibilité, à titre individuel, de vivre pendant deux jours le quotidien d’étudiants de l’Ensma, de l’université de Poitiers... Chacun le sait, avant de prendre l’ascenseur social pour le dernier étage, il y a des paliers à franchir. Il faut même parfois (souvent) quitter sa ville ou son village pour y parvenir !

À lire aussi ...