Le mariage à l’épreuve 
du temps

Jean-Claude et Viviane Marolleau fêteront leurs 65 ans de mariage le 
5 novembre, entourés de leur famille. Le couple de Jaunay-Marigny ferait presque figure d’exception dans une société où le nombre d’unions diminue, sur fond de parentalité elle aussi questionnée.

Arnault Varanne

Le7.info

C’était le 9 juillet 1957, à Saint-Porchaire, un village du Bressuirais. Déjà soixante-cinq ans que Jean-Claude et Viviane Marolleau sont unis par les liens du mariage. Les alliances n’ont pas résisté au temps, leur amour si. « On est à côté l’un de l’autre et on est bien. Mais on devrait nous donner la Légion d’honneur ! Dans nos campagnes, c’était comme ça, on se mariait et c’était pour la vie », glisse Jean-Claude entre deux plaisanteries à l’endroit de sa dulcinée. « Si on devait le refaire, on le referait », enchaîne Viviane. Même les vingt-huit mois de mobilisation de Jean-Claude pendant la guerre d’Algérie n’ont pas réussi à les séparer. Le couple de Jaunay-Marigny, lui gendarme, elle femme au foyer, a eu six enfants. Deux ont divorcé. Et parmi les petits-enfants, le concubinage est davantage la norme. Ainsi va la vie, ils ne s’en émeuvent pas. « La société a changé, c’est comme ça », analyse Jean-Claude.

Une érosion depuis 1970

Le mariage, vestige d’une autre époque ? Le sociologue Michel Gouzon pointait déjà son déclin en... 1992 dans son ouvrage Sociologie du rituel du mariage. En cause selon lui, 
« l’addition de plusieurs phénomènes, l’élévation de l’âge au mariage, la baisse de l’intensité de la prénuptialité et la hausse de la divortialité ». Et d’ajouter : 
« Dans les années 60, 10% des nouveaux mariés avaient connu une période de cohabitation préalable, au début des années 80, 60% des nouveaux mariés étaient dans ce cas. Or, le passage par une période de vie commune avant le mariage modifie le contexte et le contenu du rite matrimonial. » Les statistiques ne mentent pas. Selon l’Insee, on est passé de 406 000 mariages en 1971 à 221 000 en 2019. Une érosion lente mais continue, même si localement les cérémonies civiles se « maintiennent » autour de 200 par an à Poitiers, hors crise sanitaire s’entend. Par jeu de vases communicants, le nombre de Pacs « poitevins » a été divisé par deux et demi entre 2017 (836) et 2021 (308). Sans doute l’effet du mariage pour tous.

Du mariage 
aux enfants...

Doctorante au laboratoire Gresco(*) commun entre les universités de Poitiers et Limoges, Mélanie Bania a recueilli de nombreux témoignages qui vont dans le même sens. « Ils disent en substance « Le mariage, c’est un peu niais, je ne vois pas l’intérêt » ou « C’est une entrave à la liberté ». Dans l’imaginaire collectif, on ne peut pas rompre un mariage, qu’il soit civil ou religieux. » Au-delà, la future sociologue relève que beaucoup ne veulent « pas être dans le schéma traditionnel, patriarcal » qui associe « mariage, enfants, monospace et maison ». Car du couple à sa descendance, il n’y a qu’un pas qu’une part des jeunes femmes et hommes ne sont pas prêts à franchir. La doctorante travaille à partir de l’enquête FECOND 2011-2012 publiée par l’Institut national d’études démographiques (Ined). Laquelle révélait que 3,4% des répondants ne voulaient pas d’enfant. 
Le chiffre a sans doute évolué, restent « les questions de 
liberté, de charge mentale, d’écologie » avancées comme raisons principales à ce refus 
par ce que Mélanie Bania appelle les « childfree ». « L’une 
des grandes questions de ma thèse porte justement sur cette frontière entre altruisme et égoïsme », commente-t-elle. Jean-Claude et Viviane, rassembleront « toute la famille 
le 5 novembre », dans un restaurant de Dissay. Des enfants, petits-enfants (13) et arrière-
petits-enfants (14) qui ne marcheront pas tous dans leurs pas. Vive les mariés !

(*)Groupe de recherches sociologiques sur les sociétés contemporaines.

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