Ars Nova veut « prendre le temps »

Entre un changement de direction et une saison contrariée par la crise, Ars Nova a vécu des derniers mois mouvementés. Nommé le 1er juillet directeur général de l’ensemble instrumental associé au TAP, Benoît Sitzia regarde vers l’avenir.

Steve Henot

Le7.info

Une gouvernance « repensée »
« Avec le conseil d’administration, nous avons relevé un challenge de pérennisation. Avant, le chef d’orchestre et directeur artistique avait le rôle de direction et il était suppléé par une déléguée générale. Par souci d’optimisation, on a fusionné ces deux postes en un seul. On est aujourd’hui sur une politique de collaboration avec des chefs invités, comme Gregory Vajda que nous aurons en résidence sur trois ans. On pense que c’est un modèle vertueux, on essaye de faire bouger les lignes. (…) Depuis le premier confinement, nous avons mené une politique de soutien aux artistes, en les rémunérant sur nos fonds propres. Dans notre changement de direction, il fallait aussi repenser la communication avec eux et les équipes. Ils doivent être informés de la situation technique, budgétaire, humaine, sanitaire… Parce qu’ils ont quelque chose à dire, sont sur le plateau. En mettant en place deux délégués et un comité artistique participatif, on a significativement fait avancer les choses. Pour rester créatif, maintenir du dialogue est essentiel. »

La création à l’épreuve de la Covid-19
« On a renforcé notre présence digitale et numérique, à la fois créative et vertueuse (…) Avec le programme Carpe Diem, en partenariat avec Artchipel TV, on a voulu parler de musique au plus proche des gens qui ne sont pas dans les salles. Des musicologues, des producteurs de radio… On est dans le champ de la transmission de savoirs. Des projets comme celui-ci, on ne les aurait peut-être pas eus sans la crise sanitaire. L’idée a été de tirer une singularité dans la contrainte, pour soutenir les acteurs et les actrices de notre métier. Et se concentrer sur ces projets, c’est aussi un moyen de fédérer, de maintenir une foi dans le travail. »

La baisse de la subvention de la Région
« On a été assez impactés, c’est vrai (-50 000€, ndlr). Mais depuis, les instances régionales ont entendu ce que l’on avait à dire. On est aujourd’hui dans un travail de fond, de dialogue et de co-construction. Ce qu’on leur a présenté montre l’intérêt d’un ensemble comme Ars Nova. On est un outil de production qui peut aller là où on ne l’imagine pas. On a par exemple aidé les équipes enseignantes du Conservatoire de Saint-Palais-sur-Mer autour de leur projet ÉlectroSession, grâce à notre dispositif « Territoires de création ». Nos crédits servent à ça, à réaliser une mission de service public. J’ai bon espoir que les choses se stabilisent. Il faut aussi imaginer d’autres guichets de financement. Aujourd’hui, tout le monde comprend qu’il y a un équilibre à trouver. »

Une saison 2021-2022 apaisée ?
« On y croit. Beaucoup de nos projets internationaux ont été reportés. On aura une présence festivalière cet été, jusqu’à mi-septembre. Je suis confiant sur le maintien des productions prévues. Le pire des problèmes, c’est l’embouteillage. Certains lieux sont complets jusqu’à 2023. Aujourd’hui, l’enjeu est de privilégier la qualité, de faire en sorte que les artistes se sentent bien. C’est un principe qu’on transpose sur tous nos projets à venir. La vertu de cette période, c’est de nous avoir permis de repenser le temps de conception des projets. On était en train de le perdre. Prendre le temps, c’est s’octroyer la liberté de changer de cap. Pour que nos projets aient de l’impact, il faut se rendre compte que l’on peut faire différemment. »

 

Une captation audiovisuelle au TAP
Parmi les projets en cours, Ars Nova prépare un concert intitulé L’Analphabète. A travers plusieurs programmes thématiques, comprenant des instruments encore rares sur scène (cymbalum, pianino, zarb), ce projet pose la question de l’altérité et de l’exil à travers le langage. « On est dans un champ d’expression qui dépasse la grammaire de la langue et du son, présente Benoît Sitzia. C’est tout le pouvoir magique de la musique : parler à l’être sans même qu’il ait l’impression de maîtriser le sujet. » Ce concert aura lieu le 25 mai prochain au TAP et fera l’objet d’une captation audiovisuelle pour une diffusion ultérieure sur les réseaux d’Ars Nova.
DR

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