Les "sans étiquette" ont la cote

Plus que dans n’importe quelle autre élection locale, le « label » sans étiquette fait florès lors des Municipales. Si elle n’est désormais plus reconnue par le ministère de l’Intérieur, l’appellation rallie beaucoup de suffrages. Explications du phénomène.

Arnault Varanne

Le7.info

Officiellement, la mention « sans étiquette » a disparu des livres de comptabilité du ministère de l’Intérieur en 2001. Pour tous les scrutins, l’administration lui préfère les termes « divers gauche », « divers droite » et « autre ». Officiellement donc, plus de 24 000 « apartites » politiques -excusez le néologisme !- sont sortis des urnes en 2008 contre 3 100 socialistes et 2 600 UMP, pour ne citer que les deux grandes formations politiques du moment. Sur les déclarations de candidature aux Municipales, les candidats doivent ainsi choisir leur étiquette. Force est de constater que peu d’entre eux se rangent derrière une officine. « Ce mouvement assez ancien est plus répandu dans les petites communes que dans les grandes », relève le politologue Dominique Breillat.

A en croire le professeur de sciences politiques, les sans étiquette pencheraient davantage à droite qu’à gauche, « où les personnalités affirment davantage leur engagement ». Ce qui vaut évidemment pour les grandes communes ne vaut pas forcément pour les petites communes. La notion de rassemblement et d’union au-delà des clivages joue à plein, dans l’intérêt des administrés. D’où l’émergence des listes « Bien vivre à… » ou « Agir pour… ». Le procédé est commode et permet de rassemblement au-delà de la sensibilité naturelle de la tête de liste. Les Municipales, scrutin le moins politisé ? Dominique Breillat réfute toutefois l’assertion. Avec un argument de choc. « N’oublions pas, qu’on le veuille ou non, que cette élection va amener au pouvoir des élus locaux qui seront obligés de choisir lors des Sénatoriales de septembre. Ils devront exprimer leur sensibilité… »

Un jeu de cache-cache

Dans les plus petites communes du département, la sincérité des candidats apolitiques dits « indépendants » ne peut toutefois pas être remise en cause. A les écouter, ils s’engagent avant tout pour régler les problèmes locaux de leurs concitoyens. Dans les villes de taille plus imposante, les sans étiquette confinent parfois au cache-cache avec les électeurs. A Buxerolles, par exemple, personne n’ignore que Gérald Blanchard est un candidat de centre-droit et qu’Alain Barreau penche plutôt à gauche. « Ma démarche a toujours été claire, indique le premier nommé. En même temps, j’ai la volonté de rassembler autour d’une équipe plurielle. Les gens ne veulent pas un chef de parti à la tête de leur ville. » Dans la troisième commune du département, les électeurs ont d’ailleurs de quoi y perdre leur latin avec les étiquettes, entre le Modem soutien de Jean-Louis Chardonneau et l’Udi derrière Blanchard.

« Je crois de plus en plus que cette élection échappe à la logique des partis », estime pour sa part Eric Duboc. L’ancien chef de file de l’UDI, sacrifié sur l’autel du rassemblement avec l’UMP, a pris le parti… de Poitiers. « Tout simplement parce que les Municipales se jouent sur des problèmes concrets. » Il y a cependant un prix à payer à cette liberté de l’indépendance. Sans appareil, point de militants colleurs d’affiches et distributeurs de tracs, encore moins de subsides. Beaucoup de candidats contractent ainsi des prêts bancaires personnels pour financer leur campagne. « Ce dont on s’aperçoit, c’est que tout le monde veut rassembler, y compris les dissidents ! », note avec humour Dominique Breillat. Aucun doute, les sans étiquette ont encore de beaux jours devant eux…

 

 

 

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