mardi 24 décembre
Paul Fromonteil. 82 ans. Ex-élu à la Région, ce militant communiste de la première heure occupe ses vieux jours à servir l’amitié franco-vietnamienne, dont il est un ardent défenseur. Coup d’œil dans le rétro avec ce personnage quasi-historique.
« Quel bonhomme ! » Le cri du cœur résonne depuis le premier étage de la maison. Jeannette cherche son mari. En vain. Le « bonhomme » en question taille les rosiers du jardin, à l’arrière de la bâtisse. Il finit par comprendre que « son » rendez-vous est arrivé. Après trois jours à Brest et une journée à Cognac, dans les habits de grand témoin des Assises de la coopération décentralisée France-Vietnam, Paul Fromonteil accuse la fatigue. Las… A 82 printemps, le vétéran du Parti communiste de la Vienne refuse définitivement de raccrocher. « Il faudrait que je me calme ! »
À l’autre bout de la pièce, « L’Huma » dans une main et un stylo dans l’autre, Jeannette sourit. D’un sourire en coin, dont la signification ne souffre aucun doute sur la sincérité du propos de son mari. Intarissable sur les grandes heures de l’histoire communiste, inarrêtable à l’heure de disserter sur la coopération décentralisée, « un élément essentiel de développement d’une autre société ». Indigné, aussi, au sujet de cette mondialisation « qui nous rend fous ». Les années passent, lui ne change pas. « Je condamne l’accumulation des richesses, l’indécence des rémunérations. Le communisme, c’est justement le mouvement de « mettre en commun ». » Nous y voilà. Sur son terrain de jeu favori, ce fils de postier… socialiste excelle dans l’art de distribuer les bons et mauvais points.
Rebelle de la première heure
Du Front Populaire de 36 à l’ère Hollande, l’ex-conseiller régional au long cours a tout vécu, tout connu des « errements politiques » de la France. « A 6 ans, j’ai vu Léon Blum trahir ses engagements. En 56, j’ai voté en faveur du Front Républicain, en pensant que la paix serait signée en Algérie. En 1981, le PC a participé au retour de la gauche au pouvoir mais, deux ans après, Mitterrand a cédé aux sirènes des marchés financiers. » Trois époques, autant de « déceptions ». Et un certain désenchantement ? Il lui en faudrait plus. Un « rebelle » comme lui ne renonce jamais. Dans l’uniforme de l’insoumis du 126e Régiment d’infanterie de Brive -époque Algérie- ou dans la peau d’éminence grise de Georges Marchais, Fromonteil l’affranchi sait se faire entendre.
Marchais conclu
L’âge d’or auprès de la plus grande gueule du Parti communiste français aura duré cinq ans. Cinq années à côtoyer « ce grand dirigeant », à lui écrire ses discours, l’accompagner dans les meetings… « Et contrairement aux idées reçues, Marchais n’était pas celui qu’on pensait. D’ailleurs, le fameux « Taisez-vous Elkabbach » n’a jamais existé. C’était une farce de Le Luron. Mais ça correspondait tellement au personnage… » À l’époque, le PC flirte avec les trois mille adhérents dans la Vienne et rallie sur son nom au moins cinq cantons. En 83, Cresson et Fromonteil arrivent même à subtiliser la mairie de Châtellerault au père Abelin. Conscient que « la question régionale va devenir forte », le prof’ d’histoire-géo à Branly donne priorité au Conseil régional babultiant. Dans le sillage de Raoul Cartraud, il porte sur les fonts baptismaux le TGV Atlantique. Viendra ensuite le temps des joutes oratoires dans l’hémicycle, avec un certain Jean-Pierre Raffarin. « Quelqu’un d’intelligent et qui sait donner beaucoup de force à sa réflexion. » Chez lui, un supplément du « Canard » sur ce « Raffarin d’en haut d’en bas » traîne encore sur une vieille étagère. Et Ségolène Royal, dont il fut vice-président délégué au « Vivre ensemble » ?
« Elle a son caractère… », balaie-t-il d’une formule lapidaire. Avant d’ajouter qu’il la trouve « courageuse, battante et porteuse d’idées intéressantes ». L’exégèse du bilan de l’ex-candidate à la présidentielle de 2007 s’arrête là. Il y aurait encore tant et tant de souvenirs à exhumer des « cinquante glorieuses » de Monsieur Paul. Du premier anniversaire de l’insurrection de Budapest, auquel il a assisté, à la plongée dans cette URSS aux méthodes d’enseignement douteuses. De cette passation de pouvoir « aux premières loges » entre Jaruzelski et Walesa, en Pologne, à son épopée en Amérique Latine... Oui, un livre n’y suffirait pas. « C’est nous qui fabriquons l’histoire », aime à rappeler le vétéran du PC. La sienne restera. Quel bonhomme !
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