« Le mariage pour tous est constitutionnel »

La loi sur le mariage pour tous est-elle conforme à la constitution française ? Le Conseil constitutionnel est invité à se prononcer sur cette question d'ici au 23 mai. Pour Dominique Breillat, professeur de Droit à Poitiers, l'adoption par un couple de même sexe a davantage de risques d'être retoquée que le mariage lui-même.

Romain Mudrak

Le7.info

Petit rappel : en vertu de quoi le Conseil constitutionnel peut-il remettre en cause une loi votée par l'Assemblée nationale ?
« L'article 61 de la Constitution permet au président de la République, au Premier ministre, au président de l'Assemblée nationale ou du Sénat de saisir le Conseil constitutionnel pour examiner la conformité d'une loi avec la constitution. Soixante députés ou soixante sénateurs ont également ce pouvoir, comme on l'a vu dans le cas du mariage pour tous. »

La question prioritaire de constitutionnalité du 28 janvier 2011 peut-elle peser dans la balance ?
« Deux femmes considéraient alors comme contraire à la Constitution le fait que le mariage ne soit pas ouvert à tous. Elles ont été déboutées. En 2011, le Conseil constitutionnel avait conclu que le mariage était du ressort du législateur. Lui seul pouvait définir le cadre de cette union. »

En l'occurrence, il l'a fait. Le Conseil constitutionnel n'a donc aucune raison de retoquer le texte...
« Il faut être prudent. Il y a peu de chances que le Conseil constitutionnel annule le principe même du mariage pour tous. Des griefs ont été formulés. Ils sont de portées très inégales. Sur la forme, la procédure parlementaire n'aurait pas été respectée. On invoque aussi l'idée que le mariage est un principe fondamental, qui nécessite le référendum pour être modifié. Je ne suis pas convaincu par ces deux arguments. Les requérants estiment aussi que cette loi est contraire au droit public international, mais le Conseil est toujours très prudent dans ce domaine. En revanche, les aspects plus techniques sur l'adoption pourraient être censurés, comme les règles de dévolution du nom de famille. Ce serait certainement un élément secondaire. »

La droite pourrait-elle supprimer cette loi si elle revenait au pouvoir ?
« Tout est envisageable juridiquement. Ce qu'une loi a fait, une autre loi peut le défaire. La question est plus politique que juridique. En Espagne, la droite s'était opposée au mariage pour tous, mais une fois au pouvoir, elle n'est pas revenue sur ce texte. Toutefois, si cela devait arriver, il n'y aurait pas non plus de censure du Conseil constitutionnel. La loi d'abrogation serait accompagnée d'un effet de non-retroactivité. Les unions célébrées resteraient légales, mais il n'y en aurait pas d'autres. »
 

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