Vêtements : une boutique solidaire en prison

Que se passe-t-il après l’incarcération ? Dans cette nouvelle série, la rédaction décrit le quotidien des détenus du centre pénitentiaire de Vivonne. Privés de liberté pour quelques mois ou plusieurs années, ils se reconstruisent une vie derrière les murs. Dans ce deuxième volet, focus sur la Vesti Boutique de la Croix-Rouge et la collecte de vêtements organisée par les détenus pour les détenus.

Romain Mudrak

Le7.info

Ce lundi d’octobre, quatre bénévoles de la Croix-Rouge arrivent de bonne heure avec leur cargaison au centre pénitentiaire de Vivonne : des dizaines de vêtements de différentes tailles dans de grosses caisses en plastique. « Elles doivent toujours être transparentes afin que les gardiens puissent bien voir ce qu’il y a à l’intérieur. A l’entrée, chacune d’elles passe en plus au scanner », raconte Marie-Danielle Delis, référente territoriale prison-justice au sein de l’association qui pilote la Vesti Boutique depuis 2017. En amont, les bénévoles ont effectué un premier tri. Les vêtements viennent essentiellement d’anciennes collections cédées par des grandes surfaces et des magasins spécialisés contre des abattements fiscaux. « On retire les tenues bleu marine qui ressemblent trop à celles des gardiens, ainsi que les sweats à capuche ou les talons hauts. On demande aussi l’âge des bébés quand il y en a. »

Vêtements et layette

En quelques minutes, les quatre retraitées transforment l’une des salles du bâtiment socio-éducatif en véritable boutique de fringues. Il y en a pour tous les goûts. Des vêtements neufs et d’occasion, pour hommes et femmes, des chaussures, du linge de maison et même de la layette pour les nouveaux-nés. C’est d’ailleurs ce qui intéresse immédiatement Marina, première « cliente » du matin. Il y a neuf mois, cette jeune femme de 39 ans a donné naissance à une petite fille. Elle occupe une cellule double à la nurserie. Désormais, le nourrisson est accueilli cinq jours sur sept à la crèche Framboisine, dans le centre de Vivonne. « Comme je travaille maintenant tous les jours à l’atelier, j’ai un peu plus d’argent et je peux m’acheter de beaux vêtements », indique-t-elle. Les prix -entre 3 et 6€ par produit- défient toute concurrence. Pour 34€, Marina repart ainsi avec une quinzaine d’articles pour elle-même et sa petite. « Ce n’est pas cher mais c’est payant quand même. L’objectif est de favoriser le retour à l’autonomie en les responsabilisant dans la gestion de leur budget », explique Marie-Danielle Delis.

Une boutique très prisée

Les bénéficiaires se présentent sur des créneaux horaires réservés. Le service est très prisé des détenus, surtout des femmes. « Six Vesti Boutiques sont organisées chaque année, mais en 2020 deux ont dû être annulées à cause de la Covid. Alors cette fois, j’ai reçu 
70 demandes de détenus », souligne Marie Fabien, coordinatrice de l’action pour le Service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip). Priorité est donnée aux plus modestes. Depuis peu, des pelotes de laine figurent aussi sur les étals. « Pour les femmes, on est dans l’achat plaisir. Du côté des hommes, dans l’achat utile », remarque Nicole, bénévole à la Croix-Rouge depuis dix-sept ans. Avant de conclure : « Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce sont eux qui prennent le plus le temps de discuter. »

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