Ressources humaines : entretien avec un « chatbot »

L’IA remplacera-t-elle un jour les RH ? L’intelligence artificielle est de plus en plus utilisée dans les processus de recrutement. Reste à bien la circonscrire pour laisser la décision finale à l’humain.

Romain Mudrak

Le7.info

Il y a quelques semaines, Cylia a répondu en ligne à une annonce postée par une agence d’intérim de Poitiers. Après avoir déposé son CV dématérialisé grâce à son smartphone, surprise ! Une boîte de dialogue s’est immédiatement ouverte. Un agent conversationnel tout à fait virtuel a commencé à l’interroger. « Il connaissait mon nom, mon prénom… C’était surtout pour confirmer les données de mon CV. » Pour les questions ouvertes, impossible d’utiliser le correcteur orthographique. Sûrement un moyen de vérifier le niveau de français. Et quand le chatbot lui a demandé ses prétentions salariales, Cylia n’a pas hésité : 
« Brut de décoffrage, j’ai dit le maximum possible ! Jamais je n’aurais fait ça devant un employeur. »

Synthèse d’entretien d’embauche

Aucune question ne visait à définir sa personnalité. En revanche, que la première sélection soit opérée par une intelligence artificielle (IA) a rendu Cylia perplexe : « J’ai dialogué avec une machine pour décrocher un poste d’aide-soignante dans le médico-social. On perd le sens du relationnel. Je n’ai pas pu exprimer ma personnalité. » Finalement, la trentenaire n’a pas été recontactée.

Pascal Portes confirme que les agents conversationnels sont de plus en plus utilisés sur les phases de recrutement. « Surtout pour tenir les candidats au courant de la procédure et prendre des rendez-vous physiques », note cet expert en ressources humaines au sein du groupement d’employeurs Solutions Compétences. Il ne faut pas fixer des objectifs trop élevés au chatbot parce que l’humain doit primer et les candidats n’acceptent pas toujours d’interagir avec un robot. »

En réalité, le chatbot n’est qu’un aspect du sujet. L’IA fait actuellement une incursion massive dans les ATS, ces logiciels de recrutement utilisés par les services de ressources humaines : 
de la rédaction des annonces à la vérification automatique des expériences, en passant par le « sourcing » intelligent des candidatures sur toutes les plateformes spécialisées et les réseaux sociaux. L’IA peut trier des CV selon les critères du recruteur. Elle réalise aussi la synthèse écrite d’un entretien d’embauche, ce qui « évite de prendre des notes hyper précises et permet de regarder le candidat dans les yeux », apprécie une utilisatrice avertie. Au-delà, il est possible d’analyser la richesse métalinguistique : lexique, cohérence du discours… Et même la gestuelle. Reste à savoir si l’IA remplacera un jour les RH ? « Non, rétorque Pascal Portes, l’IA doit être un outil de lecture des candidatures afin de permettre aux recruteurs de gagner du temps sur certaines tâches et se recentrer sur leur cœur de métier, l’humain. »

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