mardi 24 décembre
Cette année, le niveau élevé des cours d’eau a retardé son apparition mais la jussie est là. Les agents du Syndicat mixte Vienne et affluents sont à l’affût pour procéder à l’arrachage de cette jolie plante invasive venue d’Amérique du Sud.
Comme 38% des espèces végétales d’eau douce exotiques, la jussie a été introduite en France pour ses qualités ornementales. Derrière ses feuilles vert tendre et ses petites fleurs jaunes délicates, elle avait l’air inoffensive et elle était du plus bel effet au bord des mares et des bassins. Seulement voilà, la belle Américaine du Sud a voulu voir du pays et a envahi toutes les zones humides à portée de racines. Au point que dans le département, les agents du Syndicat mixte Vienne et affluents (SMVA) mènent chaque année une vaste campagne d’arrachage. « La jussie se duplique très facilement et ne se régule pas dans notre milieu car elle n’a pas de prédateur naturel », explique Benjamin Glatigny, animateur général du SMVA. La jolie plante est donc devenue une EEE, autrement dit une espèce exotique envahissante qui, cette année, en raison des fortes précipitations et du niveau élevé des cours d’eau, se fait attendre. Mais c’est pour mieux réapparaître. Son arrachage, qui s’étend d’ordinaire de mai à octobre, ne débutera sans doute que fin juin. « On arrache mais ce n’est que pour limiter les dégâts à court terme », note avec fatalisme Benjamin Glatigny. La jussie est le rocher de Sisyphe des agents du SMVA. « Chaque année, on remonte d’amont en aval, en essayant d’arracher rapidement les foyers émergents. » Avec des passages obligés comme le secteur de la centrale nucléaire de Civaux.
Impact écologique
Le programme Daisie, d’inventaire des espèces invasives en Europe, a recensé 12 100 espèces introduites volontairement ou non par l’homme. En France, depuis 1982, on estime qu’une douzaine d’EEE en moyenne feraient leur apparition chaque décennie. Or, des études l’ont largement démontré, « les EEE contribueraient à 56,7% des cas d’extinction connus à l’échelle mondiale. Elles font partie des cinq causes majeures d’érosion de la biodiversité », rappelle Benjamin Glatigny. « Sur certaines berges, la jussie s’étend sur 4 ou 5 mètres de large », constate de son côté Laurent Brault, le président de l’AAPPMA des Pêcheurs châtelleraudais, également vice-président de la Fédération départementale de pêche. Par endroits, la pêche du bord est devenue quasi impossible. » Le problème est plus profond encore. « Si à court terme la jussie peut protéger certains petits alevins, à moyen ou long terme elle colmate le fond, ce qui provoque la mort des micro-organismes, les poissons ne trouvent plus de nourriture et ils disparaissent. L’arrachage annuel mené par le syndicat permet de maîtriser un peu la propagation. » L’an dernier, sur plus de 40km de berges de la Vienne (sur les 72 compris entre Valdivienne et Les Ormes), le « butin » du SMVA s’est élevé à 705m3 qui ont été stockés et séchés par les communes, sans autres débouchés. A ce jour, malheureusement, il n’existe pas de filière de valorisation de la jussie.
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