Aujourd'hui
Depuis juin dernier, pour saluer les 900 ans de la naissance de celle qui fut reine de France puis d’Angleterre, une quarantaine de brodeuses ont redonné des couleurs au gisant d’Aliénor d’Aquitaine, sous la forme d’une toile de plus de trois mètres de hauteur.
La « tombée du métier » est prévue pour avril, lorsque Margo Nirod aura assemblé les 65 carrés de 17x15cm patiemment brodés depuis juin, chaque mercredi après-midi, par les petites mains (parmi lesquelles un homme) de l’Atelier de la Dame. La costumière et bijoutière ukrainienne, installée à Joué-lès-Tours par nécessité, est devenue l’aiguille maîtresse du projet imaginé par Marie Sirgue. L’artiste plasticienne poitevine, qui n’aime rien tant que « faire ensemble », s’est saisie de l’anniversaire des 900 ans de la naissance d’Aliénor d’Aquitaine -présumée en 1124- pour lancer la confection d’une broderie aux mensurations imposantes. De fait, l’œuvre reprend en 2D le dessin du gisant, visible à l’abbaye de Fontevraud, de celle qui fut reine de France puis d’Angleterre. La broderie, de 3,10x1,20m, est une sorte de version dépliée de la statue funéraire. Dépliée et colorisée ! « Le gisant perd sa couleur mais on sent qu’elle a été forte et qu’il a été peint plusieurs fois, note Marie Sirgue. On vient donc faire réapparaître la couleur au fur et à mesure que la sculpture disparaît, sans laisser de zones blanches. C’est une libre interprétation des dessins, dans le respect des couleurs et des motifs. » L’artiste, entourée d’Axel Amiaud et de Margo Nirod, s’est pour cela inspirée de la plus ancienne chromie connue de la reine, datant de 1638.
Plus de 8 000 heures de travail
Marie Sirgue n’en revient toujours pas du succès de l’Atelier de la Dame. « Les gens sont venus en masse et ils sont restés ! » A l’instar de Michelle qui dépeint « une aventure formidable ». Quant au temps passé sur les canevas, « je préfère ne pas compter, car il y a ce que l’on brode… et ce que l’on débrode ». Comme les autres, elle a cousu ses initiales au dos de la toile.
Au total, il aura fallu près de 8 000 heures aux brodeuses pour offrir à Aliénor d’Aquitaine cette cure de jouvence orchestrée par Margo Nirod. « J’ai découvert pour la première fois Fontevraud en 2014, et cela avait été un choc, se souvient-elle. A l’époque, pour moi, Richard Cœur de Lion était un personnage de roman. » Quand Marie Sirgue est venue la chercher, elle n’a pas hésité, d’autant que la broderie fait partie de la culture ukrainienne. « D’habitude, je travaille seule. Je suis perfectionniste et pas toujours facile, explique-t-elle. C’est pourquoi jamais je n’aurais imaginé animer un atelier. Mais notre aventure est devenue une œuvre d’art. » La broderie d’Aliénor d’Aquitaine sera exposée durant le mois de juillet au Palais, à Poitiers, où elle est née dans une ancienne salle d’audience du tribunal.
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