La psychologue sociale poitevine Emilie Guichard a placé les comportements de gestion des biodéchets au cœur de sa thèse. En jeu : trouver des actions pour lever les freins au tri, bientôt obligatoire.
A partir du 1er janvier prochain, chaque usager devra trier ses biodéchets à la source. Facile à dire mais… facile à faire !
En tout cas, pas plus compliqué que d’isoler des emballages dans un sac jaune. Pourtant, des freins subsistent. Ils sont au cœur de la thèse qu’Emilie Guichard soutiendra en novembre prochain. La psychologue sociale et doctorante au Centre de recherche sur la cognition et l’apprentissage (Cerca) de Poitiers a choisi d’étudier les comportements de gestion des déchets alimentaires pour concevoir des actions de prévention.
De la littérature scientifique,
« très riche » sur le sujet, elle a commencé par extraire « les facteurs qui expliquent le plus souvent la gestion des déchets ».
A l’échelle de Grand Poitiers, les deux principaux sont la facilité du tri et le principe moral auquel il obéit. « Pour que le tri soit considéré comme facile, il faut avoir la bonne consigne et avoir de quoi stocker les déchets. La question est donc de savoir comment on formule les consignes et comment on aide les gens à s’organiser chez eux pour qu’ils s’en sentent capable. »
En distribuant par exemple des bio-seaux, dont le format est acceptable dans une cuisine.
Prise de conscience
Sur le territoire de Grand Poitiers, le deuxième argument susceptible de faire entrer le tri des biodéchets dans les mœurs tient au principe moral.
« Contrairement au plastique, les déchets alimentaires paraissent inoffensifs. Nous avons donc testé des messages en ligne pour provoquer une prise de conscience. Mais ils ne doivent pas prendre la forme d’une injonction car le sentiment doit émerger des individus. » Un premier flyer avec les consignes a suscité environ 3 000 retours, dont deux tiers contenaient une adresse mail. Le déploiement des composteurs par le service Déchets et Economie circulaire a ensuite permis de rappeler les consignes à la moitié des sondés, afin de créer deux groupes équivalents à comparer. Tous seront réinterrogés fin juin par mail.
D’autres freins, secondaires, pèsent sur les comportements comme « l’influence sociale (voisins, commerçants, etc.), le dégoût lié à la transformation de la matière (odeurs, petites bêtes…), le caractère collectif de l’effort demandé, les valeurs citoyennes ou environnementales… », énumère Emilie Guichard, tout en rappelant que « le tri des biodéchets était jusqu’à présent un comportement de militants convaincus. Pour la majorité des gens, ce n’est pas une priorité. » Dans ce contexte, comment susciter une adhésion pérenne du plus grand nombre ? « Il convient de faire le tri entre ce que l’on dit ou pas, afin de faciliter le geste, quitte à perdre sur certains aspects comme la qualité du compost. »