La trompe donne le ré

Sa passion du cheval a mené Jean-Michel Leniaud à la chasse à courre. Historien avant tout, il s’intéresse depuis une vingtaine d’années à l’histoire de cette pratique ancestrale, 
tout particulièrement à la trompe dont elle est indissociable.

Claire Brugier

Le7.info

Reconnaissable entre tous, le « son du cor, le soir, au fond des bois » dépeint par Alfred de Vigny est indissociable de la pratique de la chasse à courre. Ou plus exactement le son de la trompe, dont le cor est une version sophistiquée. Lui développe plusieurs tonalités là où son aïeule ne sonne qu’en ré. Pour autant, « il ne peut y avoir de chasse sans trompe », 
assène Jean-Michel Leniaud. Veneur au sein de l’équipage du Haut-Poitou et membre de la Fondation pour le rayonnement de la trompe musicale, l’ancien directeur de l’Ecole des Chartes est avant tout un historien. 
« Amoureux de la nature, du cheval, des paysages du coin et de l’extraordinaire événement que représente la chasse », il porte un regard érudit sur une pratique ancestrale. « C’est dans la Vienne, sous le Second Empire, qu’ont eu lieu les premières grandes chasses au cerf », 
atteste-t-il. Au fil des siècles, la simple corne destinée à guider les chiens est devenue trompe. « C’est le marquis de Dampierre qui, au XVIIIe siècle, a fixé la taille de l’instrument à 4,54m, avec un enroulement sur un tour et demi (ndlr, trois et demi aujourd’hui), et inventé un type de musique invariable, composé d’une première phrase de quatre mesures reproduites deux fois, puis d’une seconde phrase également répétée, toujours sur un rythme à 6/8. »

Une sonnerie pour tout

Au XVIIIe siècle, le Manuel de trompe classique du Prince de Conti recensait déjà une cinquantaine de ces sonneries. Depuis le répertoire n’a fait que s’étoffer. Les airs sont de trois sortes : certains sont destinés à encourager les chiens, d’autres dits de circonstances rythment les différents moments de la chasse, d’autres encore servent à rendre hommage à une personne ou un équipage. 
« Dans la chasse à courre, tout est ritualisé, il y a presque quelque chose de chamanique », 
constate l’historien. Départ, appel aux chiens, changement de forêt, gibier repéré dans une mare, hallali… Chaque épisode est sonné, tout comme la 
« curée », la cérémonie qui suit la mise à mort de l’animal, ou encore la messe de la Saint-Hubert. Et, le saviez-vous ? « La chanson du Bon Roi Dagobert est un air de chasse poitevin, note Jean-Michel Leniaud, car Dagobert chassait en Brenne. »

Cédit photo : Jean-Pierre Peronnaud.

 

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