C’est notre bien le plus précieux, mais aussi le plus menacé. Entre pathologies chroniques en hausse et casse-tête sur son financement, le capital santé des Français est soumis à des turbulences inédites. L’économiste de la santé Frédéric Bizard (*) trace quelques lignes de force.
La semaine dernière, les principaux candidats à la Présidentielle ont passé leur grand oral devant la Mutualité française, à Paris. L’occasion pour eux -Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon étaient absents- de dévoiler quelques-unes des mesures phares qu’ils mettraient en œuvre s’ils accèdaient à l’Elysée, en mai prochain. Financement de la sécurité sociale, remboursement des soins, fin de vie… La rédaction a compilé ces mesures, dans ce dossier spécial dédié à la santé de demain. Et même d’après-demain ! Car ne nous y trompons pas, l’émergence du big data appliqué à la santé, la recrudescence des maladies chroniques, qui toucheront bientôt un Français sur deux, l’impérieuse nécessité de réaliser des économies de gestion ou encore la multiplication des objets connectés s’annoncent comme autant de révolutions dans notre quotidien.
« Donner aux individus la capacité d’agir »
Quel rôle jouera l’hôpital ? Et les cliniques ? Quelle place restera-t-il aux personnels soignants ? Comment les médecins généralistes devront répondre aux nouveaux besoins de proximité ?... Autant de questions qui appellent des réponses très diverses. Dans son dernier livre « Protection sociale : pour un nouveau modèle », Frédéric Bizard pointe le triple défi auquel la France devra faire face. D’abord « une transition démographique, avec un vieillissement intensif de la population jusqu’en 2030 ». « Ce qui entraînera de fait une augmentation de la demande de prestations, ajoute l’économiste de la santé. Il faut donc élaborer une vraie stratégie du maintien en bonne santé, contrairement au système actuel, uniquement curatif. »
Deuxième défi : « mieux appréhender le passage des risques courts à des risques plus longs ». Autrement dit à des affections plus durables et coûteuses pour la collectivité. « D’où la nécessité de donner aux individus la capacité d’agir. Par exemple, il ne faut pas juste traiter les personnes atteintes de diabète, mais leur donner les moyens de bien vivre avec cette maladie. » Frédéric Bizard prône ainsi « davantage de politiques tournées vers l’éducation et la prévention ». Au-delà, le professeur à Sciences-Po préconise de « passer d’un système corporatiste à un système universel, dans lequel les droits sociaux seraient attachés aux individus et non plus aux statuts professionnels ». Dernière transition, la révolution numérique, source de « meilleur accès à l’information » et de progrès sur l’accompagnement thérapeutique. Des pistes à explorer pour après-demain. Dans ce schéma, mai 2017 paraît un horizon déjà dépassé.
(*) « Protection sociale : pour un nouveau modèle », à paraître le 1er mars aux Editions Dunod. 352 pages. Prix : 24€.
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