Ces médecins qui choisissent <br>la campagne

Depuis 2009, le Conseil départemental attribue des bourses aux étudiants en médecine qui s’engagent à s’installer en milieu rural. La mesure a été étendue aux dentistes et aux orthophonistes. De quoi compenser le manque d’attractivité de la Vienne ?

Arnault Varanne

Le7.info

En deuxième année d’internat à la Fac de médecine de Poitiers, Marie Larrieu connaît déjà son avenir professionnel. Originaire de Toulouse, passée par les Landes et le Lot, la jeune femme a « toujours vécu à la campagne ».  Aussi, son choix de s’établir à Civray comme médecin généraliste relève presque de l’évidence. « Avec mon compagnon, nous avons prospecté en Charente-Maritime et en Deux-Sèvres, mais le Sud-Vienne nous plaît, d’autant que la proximité de la N10 rend les déplacements plus faciles. » Comme vingt-cinq autres étudiants (*), elle bénéficie d’une bourse du Département, dont le montant s’élèvera au maximum à 38 400€. En contrepartie, elle devra exercer au moins sept ans à Civray.

« Personnellement, l’aspect financier n’a pas été déterminant, témoigne Marie Guillemot-Léquipé. La néo-praticienne, qui effectue des remplacements à Bonnes, Persac et Montmorillon, estime important d’« assurer la permanence des soins en milieu rural ». Tout en précisant vouloir « concilier vies professionnelle et familiale ». Autrement dit, pas question d’imiter « ses » aînés, asservis à la tâche, multipliant les heures sup’ et les longs déplacements. « En trente ans, la médecine a évolué et heureusement ! », poursuit-elle. La réalité est cruelle pour des départements ruraux comme la Vienne, la Manche, l’Allier ou la Côte d’Or, autres territoires à retenir les futurs professionnels à coup de milliers d’euros. Du reste, dans le « 86 », les médecins et les dentistes seront bientôt rejoints par les orthophonistes. « Et pourquoi pas par les sages-femmes ou les kinés demain, dans les secteurs où nous sommes déficitaires », prolonge Bruno Belin, président du Département. 

70% en ville

Cette politique volontariste s’accompagne, en parallèle, de la mise en place de Maisons de santé pluridisciplinaires. Quatorze ont déjà ouvert et six sont en projet. Car il ne faut pas s’y tromper : l’isolement constitue un vrai repoussoir pour les jeunes professionnels. « C’est pour cette raison que 70% de nos étudiants choisissent d’évoluer en milieux urbain ou périurbain », abonde Pascal Roblot. S’il reconnaît l’utilité des bourses, le doyen de la Fac de médecine-pharmacie de Poitiers invite chacun à « repenser la santé en termes de parcours ». « Installer un médecin, s’il n’y a pas autour des paramédicaux, une pharmacie ou qu’un patient est obligé de faire 40km pour d’autres rendez-vous, cela n’a pas beaucoup de sens… »

« Dans les jeunes générations, le changement de mentalité est profond »
, estime de son côté le Pr Gil, ancien doyen de la Fac de médecine. Ils veulent avoir une vie conforme à leur temps et n’ont jamais envié le médecin de jadis… » En attendant de résoudre cette équation compliquée, la Vienne conserve un tissu de praticiens que beaucoup d’autres départements lui envient. Cette année, six cent dix-neuf généralistes (2) sont en activité. Dont des médecins de campagne. Enfin, plus tout à fait les mêmes qu’avant… 

(1) Depuis 2009, huit médecins généralistes et un dentiste ont été installés. Les autres sont encore en formation. 
(2) Ils devraient être 609 en activité à l’horizon 2020. La Vienne compte par ailleurs 764 spécialistes.

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