Hier
La sécheresse de ce printemps a rappelé les agriculteurs au devoir de gestion optimale de l’eau. Promise le 9 juin dernier par Nicolas Sarkozy, la construction de réserves de substitution a été entamée, depuis quelques années, par les irrigants de la Vienne.
Ils n’ont pas attendu les annonces du président de la République pour réfléchir à la gestion de l’eau. Les irrigants de la Vienne et leur figure de proue, Jean-Luc Pousse, tiennent à le faire entendre. Ils redoublent même d’efforts pour expliquer les démarches entreprises.
« Nous sommes conscients que l’eau est un sujet sensible dans l’opinion publique, lance le président de l’Adiv (Association des irrigants de la Vienne). Il ne faut pas nous diaboliser. Notre engagement écologique n’est pas nouveau, encore moins opportuniste. » Ouverts et pédagogues, les agriculteurs du département se veulent aussi réalistes. « Nous ne réclamons aucun droit à l’irrigation en de telles situations de sécheresse », clament-ils en choeur. Alors que veulent-ils ? « Que nos réserves de substitution, issues des surplus pluviométriques de l’hiver, se développent et se multiplient, pour éviter le prélèvement massif au printemps et à l’été. »
80% de financement public
Sur le papier, le projet est séduisant. Pour les agriculteurs concernés, c’est la « solution » à leurs problèmes, les quatre réserves existant sur le département ayant déjà fait la preuve de leur efficacité. Du coup, les irrigants et leurs partenaires institutionnels, dont la Chambre d’agriculture et l’Agence de l’eau Loire et Bretagne, ont décidé d’opter pour un vrai contrat de territorialisation, dont la finalisation arrive à échéance. Ledit contrat doit favoriser la création d’une cinquantaine de « bassines » à l’horizon 2017. Le coût estimé de chacune de ces réserves s’élève à 400 000€. Leur financement sera assuré, à hauteur de 20% par les agriculteurs eux-mêmes, 10% par les collectivités territoriales et 70% par l’Agence de l’Eau. Soit 80% de deniers publics alloués à des structures pouvant «alimenter», au cas par cas,entre un à cinq irrigants. Pour Jean-Luc Pousse, l’effort est indispensable : « Ces bassines vont nous permettre d’assurer notre activité économique, tout en garantissant la préservation des milieux aquatiques. Elles constituent une vraie alternative écologique au pompage des rivières et même au prélèvement des eaux de ruissellement qui alimentent les nappes phréatiques. »
Réactions des militants locaux d'Europe Ecologie Les Verts.
« Les réserves de substitution : une solution à long terme ? Après un printemps exceptionnellement sec, certains agriculteurs continuent de réclamer des réserves de substitution pour pouvoir irriguer massivement. Une simple solution de bon sens selon eux, et ils sont d'ailleurs soutenus par les élus UMP... alors que Nicolas Sarkozy demande à son administration agricole de diminuer considérablement la consommation des volumes d'eau annuels dédiés à l'irrigation ! Cherchez la cohérence !
Mais ces bassines sont-elles si efficaces ? A y regarder de plus près, pour nous Europe Ecologie Les Verts, cette solution est bien moins évidente qu'il n'y paraît pour au moins 5 raisons :
1/ La nature géologique de type karstique dans la Vienne n'est guère adaptée à ce type de construction : d'ailleurs deux bassines sont abandonnées avant d’avoir servi et la construction d’une troisième (largement fissurée) est interrompue !
2/ Comme il est parfois interdit de pomper en été dans les nappes et les rivières, il est certes plus facile d'y pomper en hiver l'eau nécessaire pour les cultures. Mais on ne fait que déplacer le problème, car ces prélèvements confisquent aux nappes et rivières une partie des apports indispensables à leur rechargement, ne serait-ce que pour constituer des réserves d'eau potable !
3/ Construire des réserves aurait effectivement un avantage immédiat si le climat océanique de nos régions perdurait. Or il est avéré aujourd'hui qu'à cause du réchauffement climatique et en raison des faibles taux de boisement et de l'arrachage des haies, notre région est plus exposée à l'assèchement climatique progressif que les pays forestiers. Seul un reboisement massif, sous forme de haies ou d'agroforesterie peut apporter une solution à long terme.
4/ Et n'oublions pas que les difficultés d'irrigation sont directement liées au type de cultures, comme le maïs irrigué et aux pratiques culturales : garder les sols couverts réduit fortement leur assèchement.
5/ Et puis dernier argument et non le moindre ! Ces réserves à 1 million d'euros en moyenne sont financées à hauteur de 70% par des fonds publics, alors qu'elles ne sont utilisées parfois que par 2 agriculteurs ! Cela n'est guère admissible et c'est pourquoi nous suggérons une réorientation des subventions européennes, gérées par les collectivités, pour que se mette en place une agriculture respectueuse des ressources naturelles.
La reconquête de la qualité de l'eau ne peut se faire avec les réserves de substitution ! Or Nicolas Sarkozy, en Charente jeudi dernier, a dit qu'il ferait en sorte qu'il ne soit plus possible de déposer de recours contre ces ouvrages. La protection de l'environnement et l'intérêt général sont ici clairement attaqués au nom de la défense de la vocation stratégique de cette agriculture. EELV en revanche milite sans hésiter pour des relations stratégiques internationales plus justes, dans lesquelles l'EAU est respectée et accessible à tous. »
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